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jeudi 12 décembre 2024

L’Édito du président – décembre 2024

L’édito de Laurent Le Daniel, Président de la Confédération nationale des artisans pâtissiers, chocolatiers, confiseurs, glaciers, traiteurs

La loi du 5 septembre 2018, qui portait pourtant le joli postulat « Liberté de choisir son avenir professionnel », est à ce jour une belle cacophonie à mon sens. Je me rappelle avoir été sollicité par ma CMA régionale à la fi n de 2017 pour avancer des idées sur la loi à venir. Nous avions deux semaines pour nous prononcer. Nous, pâtissiers, amoureux du travail bien fait, savons combien il faut du temps pour faire de belles choses. Ce travail, à l’époque, et cela n’engage peut-être que moi, n’a pas été appréhendé d’une belle façon, probablement trop vite ou alors avec des principes qui nous échappent, à moins d’être baignés jusqu’au cou dans cette soupe complexe.

Nous en payons le lourd tribut dans nos entreprises, qu’il s’agisse de l’apprentissage, pour nos « apprentis » (vocabulaire historique dans notre jargon, devenus de simples « alternants »), ou de la formation continue, intelligemment nommée « PDC -50 » (comprenez « Plan de développement de compétences des entreprises de moins de 50 salariés »).

Libéraliser la formation pour en retirer tous les obstacles ! En voilà une belle idée ! C’est un peu comme si demain on allégeait le code de la route, sujet bien complexe également, et extrêmement contraignant, mais qui conduit simplement à plus de sécurité.

La multiplication des centres de formation, pas tous nourris de belles intentions pédagogiques et de qualité de formation, malgré un label Qualiopi très contestable, surtout dans le domaine de l’alternance, le laisser-aller sur le nombre et les compétences des maîtres d’apprentissage, et j’en passe, ont ouvert la porte à un désordre dont nous subissons les frais. Le résultat : des formations en CFA très mal financées dans leur globalité par une mesure du coût contrat très mal appréhendée. Bon, ce calcul, dont nous contestons la formule depuis le début, est enfin remis en question. Nous verrons bien où cela nous mènera en 2025. La prime à l’apprentissage, juste retour sur l’investissement du temps à consacrer à un apprenti et pour pallier ses absences, rabotée de 25 % en 2025 mais maintenue dans les entreprises de plus de 250 salariés, entreprises pour lesquelles il y a l’obligation d’avoir 5 % d’alternants. Cherchez l’erreur. C’est obligatoire, mais on leur donne une prime incitative. Je rêve ? C’est un peu comme si on me donnait une prime si je respecte les 130 km par heure sur l’autoroute. Preuve s’il en fallait que l’État ne distingue plus, sauf dans les discours, pas dans les actes, les petites entreprises que nous sommes, des grands groupes. Les lobbyistes travaillent décidément très bien !

Autre catastrophe, la formation de nos salariés dont les crédits à la formation sont déjà épuisés au milieu de l’année, provoquant l’arrêt de formations pour nos collaborateurs et la mort annoncée de nos brillants centres de formation, déjà bien abîmés par le Covid. Mais ne nous y trompons pas. La responsabilité pourrait vous apparaître évidente d’incriminer l’Opco EP (Opérateur de compétences des entreprises de proximité), qui distribue les crédits de la formation. L’organisation de 54 branches, régie de façon bien paritaire avec ses représentants de salariés et autant de représentants des employeurs, n’est en réalité « qu’un passeur de plat », pour reprendre une formule amusante que j’ai entendue la semaine dernière en CA. La réalité est que l’organisme France Compétences, pourtant géré aussi de façon paritaire, n’a d’autre choix que de voter les décisions de distribution des finances, dûment récoltées dans les entreprises, décidées par l’État, aux 11 Opco. Il faut être un petit peu initié pour comprendre que nous n’y pouvons rien !

La formation, la transmission, l’apprentissage, qui sont des éléments de notre ADN, nous échappent, même si on vous dit le contraire. Un rétropédalage est-il possible ? On a le droit de croire au Père Noël ?